Térébenthine de Carole Fives

Dans un style étonnant, à la deuxième personnes du singulier, où les tu scandent la narration, Carole Fives nous replonge dans le jeunesse de ses personnages, à ce moment où, jeunes bacheliers ils ont été admis à l'école des Beaux-Arts de Lille.

Férus de peinture, à une époque où  il vaut mieux devenir vidéaste, pratiquer les arts plastiques ou créer des installations, ces trois-là seront rapidement surnommés 'térébenthine' en raison de l'odeur qui les enveloppe.

En l'absence de cours classiques, l'héroïne se trouvera un professeur de ville pour apprendre à dessiner les nus, les compositions classiques. Dans l'école, elle trépignera devant le machisme des cours qui oublie les artistes femmes pour ne parler que des hommes ... et ces femmes peintres deviendront un sujet d'exposé mémorable !

On suivra ces trois-là durant leurs trois années d'études, franchissant les épreuves des 'concours de passage en classe supérieure, et, finalement diplômés, se heurtant à l'incompréhension de leurs proches.

Lucie sera la première à faire défection, passant le CAPES, et devenant professeur d'arts plastiques en collège. 

L'héroïne, qui avait peu à peu intégré des textes dans ses toiles, sera emportée par ceux-ci et deviendra écrivain ... 

Et c'est à l'occasion du décès de Luc, le seul à être resté fidèle à la peinture, qu'elle prendra la plume pour se remémorer leurs années d'apprentissage.

Un roman qui porte la nostalgie amère de ce temps d'études, dans l'adversité et la difficulté, mais les "tu" saccadés résonnent comme des accusations portées contre l'héroïne qui a abandonné la peinture pour l'écriture. 

Un roman qui au-delà des siècles, répond à "L'œuvre" d'Emile Zola dans ce portrait d'artiste, cette confrontation entre Claude Lantier et Luc.

Une auteur que j'avais découverte avec "Une femme au téléphone", et qui dévoile ici une autre facette de son talent.