Connemara de Nicolas Mathieu

J'ai découvert Nicolas Mathieu il y a quelques années, non pas par un de ses romans mais par l'adaptation en série de 'Aux animaux la guerre'. 

Chômage, désespérance, petits larcins, survie, ... Les thèmes étaient là et bien traités ... 

Thèmes amplifiés, dans son second roman, Leurs enfants après eux,, au prix Goncourt très mérité ! 

Là, je n'ai pas attendu longtemps avant de me plonger dans Connemara.

Toujours en Lorraine, avec une alternance entre le récit des années adolescentes d'Hélène, bonne élève, trop bonne élève sans doute pour se sentir à sa place dans un Epinal étriqué, et, en parallèle, celle de Christophe, star prodige de l'équipe de hockey.

A la fin des années collège, Hélène avait pu entrevoir la vie dorée d'une famille de cadres, les parents de son amie Charlotte, langage châtié, vacances sur l'île de Ré et horizon sans barrière. Forte de ses succès scolaires, elle avait fait une école de commerce ,une du top 10 (pas du top3 - auto-limitation ?) et depuis donnait conseils en stratégie, restructurations, et optimisations en tous genres, en bonne chasseuse de doublons et de rentes en tous genres.

Mère de deux filles, un compagnon sorti du Top 3 qui s'était bien recasé quand le burn-out d'Hélène leur avait fait quitter Paris pour Nancy. Mais Hélène s'ennuie (bovaryse ?), trouve que son compagnon ne s'implique que le minimum dans la gestion du quotidien où elle s'enlise et s'englue.

Sa seule échappatoire : les bières bues avec Elise, sa stagiaire qui l'initie à Tinder, 

Christophe est resté à Epinal, il est commercial en produits canins,  a un enfant, est en train de se séparer de sa compagne dont il a un enfant. Son père, ses copains, les soirées bien (trop) arrosées, la vie simple, sans prétention, les chanson de Sardou ... 

Entre la bobo et le provincial, il suffira d'une rencontre, ou plutôt d'un échange de regards dans un restaurant, pour qu'à a grâce des réseaux sociaux ces deux extrêmes se retrouvent et, du moins pour Hélène, concrétisent les rêves de l'adolescence.

Un roman empli de désespérance, de questionnements, de bouleversements quarantenaires. 

Quand faut-il abandonner ses rêves d'ado ? L'adolescence qui semble durer encore pour ces deux personnages qui ne semblent pas avoir franchi le pas de l'âge adulte. Rêver encore, ne pas composer avec le réel, la vie qui impose les complaisances ... 

De belles pages sur la vacuité, l'impertinence et l'inutilité des cabinets de conseil ... 

Un roman qui fait écho à l'essai d'Adrien Naselli sur les transfuges de classe ...

Un roman bouleversant, un roman qui met le doigt sur les troubles actuels.