romans asiatiques (hors japonais)
Pluie de Kim Chew NG
La vie est rude à l'orée de la jungle malaisienne, comme le montre ce roman en huit tableaux, d'époques et de contextes différents mais tous ancrés dans ce coin de jungle dominée par la forêt d'hévéas, les tigres qui rôdent, les insectes qui pullulent, la rivière qui enfle, les milices qui patrouillent.
Fuyant l'avancée japonaise, une famille de migrants chinois s'y est installée vivotant de la récolte de sève d'hévéa, emportée au village sur un vélo hors d'âge.
La pluie d'une mousson incessante fait gonfler les ruisseaux et impose aux animaux de quitter les forêts ... et la pire crainte de la mère se produit quand une tigresse affamée emporte un enfant.
Il y est aussi question d'une pirogue ancestrale trouvée sous les combles de la maison et qui ne voguera que dans l'un des tableaux ...
Un roman oppressant, entre conditions climatiques, escarmouches meurtrières entres forces japonaises, guérilla communiste et restes de colonialisme britannique
Un roman qui a reçu cette année le prix Emile Guimet
Neige de Pema Tseden
Le mois dernier, j'étais partie en Mongolie, avec Ciel bleu.
Je suis revenue sur les hauts plateaux avec ce recueil de nouvelles de Pema Tseden.
Sept nouvelles qui évoquent tour à tour la vie aventureuse d'un moine défroqué, des éleveurs de moutons sur les hauts plateaux, les retrouvailles de camarades d'école ...
Et le choc ressenti par un touriste américain, venu chercher la paix, et découvrant, en Une du journal local, la photo d'un avion s'encastrant dans le World Trade Center.
Un recueil dépaysant qui donne à voir, par petites touches et sans polémique la main-mise de la Chine sur le Tibet.
Une belle découverte
et ... un nouveau pays à mon actif dans le Challenge Globetrotter
Une enquête du vénérable juge Ti par Qiu Xiaolong
Dans ce roman Qiu Xiaolong a délaissé l'inspecteur Chen pour remonter le temps et nosu offrir sa version d'une des enquêtes du juge Ti, basée sur un des faits divers les plus célèvres de la Chine du XIème siècle.
Une poétesse-courtisane célèbre, Xuanji, a été accusée du meurtre de sa servante. Une première sentence a été exécutée par un juge local ; la belle dame s'est vue rouée de coups pendant l'audience où elle avait avoué le meurtre, mais après avoir proposé une autre version du drame, elle est emprisonnée dans l'attente d'un éclaircissement de la situation.
De passage dans la région, le juge Ti et son fidèle domestique essaieront de découvrir les ressorts cachés de l'affaire, en laissant de côté le renard magique qui semble terroriser les campagnards.
Un roman assez alambiqué, où de nombreuses caractéristiques de Chen sont attribuées au juge Ti : la passion pour la poésie, pour la poésie amoureuse : ici se croisent les poèmes de Xuangi et de son amant Wei, mais un roman que j'ai trouvé un peu long bien qu'il ne fasse que 138 pages !
Le dernier roman de l'auteur m'attend dans ma liseuse ... je m'y plonge bientôt !
Bangkok déluge de Pitchaya Sudbanthad
Dans ce premier roman, l'écrivain thaïlandais Pitchaya Sudbanthad, nous entraîne à Bangkok, dont il va nous montrer les évolutions de la fin du XIXème siècle à la fin du XXIème, en compagnie de quelques personnages dont les récits vont s'entrecroisent, voire se mélanger au fur et à mesure du déroulement du récit
Située au bord du fleuve Chao Phraya, Bangkok en subit les caprices et notamment les inondations qui l'a ravagent et dont la violence s'accroît avec la bétonnisation endiablée de ces dernières décennies.
il évoque les ravages causés à l'une de ses héroïnes par la répression sanglante des émeutes étudiantes des années 70, tandis que certains militaires se sont de faits une virginité au Japon ...
Il nous ramène dans le quotidien de missionnaires américains qui devaient gérer la pénurie de médicaments et de matériel pédagogique et religieux, soumis au recrutement de nouvelles ouailles
il nous parle de la faune est de la Dolores locale, avec quelques anecdotes sur la disparition progressive des animaux, éléphants, oiseaux et serpents, qui ont peuplé les bords du fleuve et dont seuls les derniers sont toujours là
il évoque également ceux qui ont ruiné pays, pour s'en libérer ou pour avoir une meilleure vie loin de leurs origines, avec sur leurs épaules le poids d'avoir abandonné pleurs parents et leurs ancêtres
Un roman choral qui donne à voir des aspects de la vie quotidienne, qui partage les odeurs, la nourriture, les usages ...
Un roman dépaysant
Un auteur dont j'espère découvrir d'autres productions
Requiem pour Alain Gerbault de Luis Cardoso
Catarina a grandi à Batavia (aujourd’hui Djakarta), dans l’attente du Prince charmant.
Fille de commerçants, d’un père chinois et de mère européenne. Elle a été éduquée à l’européenne, apprenant à parler les langues étrangères, à jouer du piano et à lire les classiques.
Elle trouva son fiancé sous la forme d’un visiteur de son père, Alberto Sacramento Monteiro, capitaine du port de Dill, qui lui offrit un chat et entra en affaires avec son père, tous deux se partageant l’exploitation d’une plantation de café,
Mais la récolte fut mauvaise, le beau capitaine ne revenait pas et Catarina embarqua sur un cargo hollandais pour le retrouver, emportant dans sa valise un exemplaire du livre d’Alain Gerbault : ‘A la poursuite du soleil’
Elle s’installa chez Alberto, absent, y pris ses aises, découvrit la ville et ses habitants truculents et lorsque son fiancé arriva, il la gratifia d’un « Tu n’aurais jamais dû venir ! » puis sans passer par la case mariage, prit sa nuit de noces, où un fils fut conçu !
Et repartant comme il était apparu, il laissa Catarina gérer la Fazenda Sacromonte, la plantation de café.
Mais, fidèle à la tradition qu’il avait initié, tous les amants de Catarina lui offriront un chat portant leur nom !
Un jour Alain Gerbault arrivera enfin à accoster à Dill. Catarina l’hébergera quelques jours chez elle, discutant des heures entières de ses voyages, de ses aventures … Malade, il sera transféré à à l’hôpital de la ville où il sera terrassé par la malaria. Catarina sera justement à l’hôpital lorsque sa maison sera détruite par un incendie qui emportera tous ses chats
Auto-proclamée exécuteur testamentaire d’Alain Gerbault, Catarina déploiera toute son habileté pour que son vœu d’être inhumé en mer soit respecté.
Un roman foisonnant sur la vie dans cette île du Pacifique où anciens colons européens, portugais et néerlandais, se voient peu à peu supplantés par les marchands japonais en mode de conquête pacifique dans ces années précédant la seconde guerre mondiale.
em de Kim THÚY
J'ai découvert Kiim THÚY avec son deuxième roman Màn puis avec Rù, tous deux empruntés à la médiathèque et que j'avais beaucoup appréciés.
Alors quand Babelio m'a proposé de recevoir son dernier opus, en préalable à une rencontre avec l'auteur (en zoom, le 17 mars prochain), je n'ai pas hésité une seconde, et j'ai eu la chance d'être sélectionnée !
Dans em, l'auteur nous transporte au Vietnam, au temps de la colonisation française de l'indochine quand les colons y plantèrent les hévéas nécessaires à l'industrie du pneu. Pour exploiter ces plantations, ils utilisaient de la main d'eouvre bon marché, coolies venus d'Inde ou de Chine envoyés aux Antilles ou en Amérique et coolies vietnamiens exploités à domicile.
D'une histoire d'amour entre Alexandre, un planteur et Maï, la servante, nait Tam qui échappe miraculeusement, grâce à sa nourrice, au massacre de ses parents et à l'incendie de la plantation.
Réfugiées à My Lai, puis à Saigon, elles se retrouvent malheureusement à My lai, lors du massacre qui a rendu ce village sinistrement célèbre.
D'autres personnages arriveront et contribueront à donner un condensé, un concentré de l'histoire du Viet Nam au XXème siècle.
En chapitres courts, Kim THÚY, dans ce très (beaucoup trop) court roman arrive à nous montrer la résilience de ces personnes qui déracinées, meurtries, blessées, ont fait face, ont réinventé leurs vies, à l'autre bout du globe créant une diaspora unie qui a créé des entreeprises tentaculaires à échelle humaine.
Qui aurait pu imaginer qu'une petite boutique californienne serait devenue le point fondateur du réseau mondial des manucures vietnamiennes ?
Par petites touches, avec lucidité, frachise et factuellement, nous suivons tour à tour ces orphelins qui sont devenus voyageurs internationaux et qui se croisent, se connaissent et se reconnaissent.
Un roman incontournabe.
Une auteur majeure.
Terre errante de LIU Cixin
A peine finie la lecture d'Impact, je me suis plongée dans Terre errante, sans savoir de quoi parlait ce très (trop) court roman.
Et quelle claque !
Ce roman chinois évoque le départ de la Terre de l'orbite solaire, pour sauver l'humanité, de la transformation du soleil en 'géante rouge'.
Les terriens ont eu quelques siècles poru s'y préparer, des propulseurs géants ont été installés sur l'hémisphère nord, et les habitants vivent sous terre, sortant rarement admirer océans gelés, villes immergées et épisodiques levers et couchers du soleil.
Dans une écriture resserrée, précise, nous suivons un petit garçon, de son enfance, 400 ans après le début de ce projet, conçu par une coalition mondiale, tout au long de sa vie, jusqu'à l'échappée de la terre vers Proxima du Centaure.
Un roman court mais puissant, servi par des desccriptions terribles de la surface de notre Terre, et des conditiosn de vie de ses habitants régis par la poursuite du bien commun.
Un récit qui va rester longtemps en moi.
Une adaptation cinématographique existe. Je la visionnerai très vite.
Nuit obscure de Li Ang
Un roman taïwanais découvert sur les rayonnages de la médiathèque du village voisin.
Nationalité inédite pour moi, à cocher pour le challenge Globe Trotter des lecteurs de Babelio et pour le challenge Riquiqui ..
Mais ... un roman assez indigeste car fortement alambiqué sur le quel j'ai traîné plus de deux semaines pour seulement 194 pages de textes (enfin demi-pages, puisque publié chez Actes Sud !)
Un étudiant en philosophie, spécialiste d'éthique vient annoncer à un homme d'affaires que son épouse a une aventure avec son ami et associé.
Au fur et à mesure des informations de l'étudiant, les pensées de l'homme d'affaires nous font revivre sa vie, des humiliations de l'enfance aux spéculations et corruptions d'aujourd'hui.
Il ne cache rien de la liaison de l'épouse, de leurs lieux et des conséquences ...
J'ai trouvé ce roman globalement assez glauque où la corruption généralisée gangrène tous les personnages, même ceux qui s'affichent purs.
Bref, deux items de challenge cochés, mais une lecture décevante !
La somme de nos folies de Shih-Li KOW
Toujours à la recherche de nationalités inédites pour progresser dans le challenge Globe-Trotter des lecteurs de Babelio, j'ai trouvé récemment un roman malais sur les étagères électroniques de ma bibliothèque !
Et j'ai découvert un récit qui m'a plongée dans la vie quotidienne de trois personnes de Lubok Sayong, un village de la banlieue de Kuala-Lumpur. Beevi, petite vieille au caractère bien trempé et conteuse hors pair mène de main de maître sa maison d'hôtes composée par son père pour y héberger ses épouses successives, Auyong, son copain, un vieux chinois, aussi paisible que Beevi est agitée, et Mary Anne, adoptée par la sœur de Beevi, que cette dernière a recueilli .
Lubok Sayong est situé entre les bras d'un fleuve qui peut les gratifier de deux crues majeures par an, et qui les inonde calmement très régulièrement.
La solidarité contre cette adversité de la nature rend harmonieuse la vie de ce village où cohabitent chinois, malais et indiens.
Le roman se compose de chapitres où, tour à tour Auyong et Marie-Anne partagent des scènes de la vie de leur maisonnée, comme, entre autres, une tragique partie de pêche, le déménagement d'un des bungalows de leur maison pour être transporté sur une île-hôtel, la punition originale de harceleurs dans l'usine de mise en boîte de litchis, ou les péripéties du fantôme du jardin.
Bref, un roman très plaisant qui m'a donné envie de découvrir de découvrir d'autres œuvres malaises.
L'élimination de Rithy Panh
Rithy Panh est un cinéaste d'origine cambodgienne.
En 1975, il avait 13 ans, quand les khmers rouges ont pris le pouvoir à Phnom Penh et que s'est installée la dictature de Pol Pot.
Le maître mot du nouveau régime : l'élimination.
Elimination des comportements individuels, élimination des anciennes élites, élimination des ressources, élimination des prénoms réduits à une seule syllabe, élimination des individus ...
Pendant les quatre années de ce régime, le petit Rithy va assister à la mort des membres de sa famille, de son père à ses petits neveux.
De camps de travail, des rizières aux hôpitaux où il triera les cadavres, il surmontera les blessures, les mauvais traitements, échappera aux tortures, mais pas aux souvenirs indélébiles.
Dans cet ouvrage, il se confronte à l'un de ses démons, "Duch, le maître des forges de l"enfer", responsable du centre S21, qu'il a mis en images, pour garder la mémoire, ne pas oublier et honorer les disparus.
Récit bouleversant, tout aussi fort que lés témoignages de la Shoah, d'une histoire tellement plus récente.
Récit d'un survivant, toujours assailli par des images, des sons, des cauchemars.
Ouvrage indispensable pour connaître cette histoire récente de l'Asie du sud-est.